Code la nationalité ivoirienne : Explication de l’article 48 par le ministre de la Justice, Sansan Kambilé
AfriksoirMai 4, 2025Lire l'original
Le ministre de la Justice et garde des Sceaux, Jean Sansan Kambilé a expliqué sur le site du ministère, début 2025, l’article 48 du code de la nationalité ivoirienne. Ci-dessous, ses explications.Ayant fait mes études supérieures en Côte d’Ivoire jusqu’à l’obtention d’une maîtrise en Sciences Physiques, je me suis rendu aux Etats-Unis d’Amérique à l’effet d’y poursuivre mes études. Des années plus tard, marié, j’ai obtenu la nationalité américaine. Revenu récemment en Côte d’Ivoire, mon pays natal, pour le faire découvrir à mes enfants dont certains sont majeurs, j’ai voulu profiter de ce séjour pour faire établir une carte nationalité ivoirienne, pour moi et mes enfants. Je n’ai pas eu de mal à obtenir le certificat de nationalité, puisque j’en avais une ancienne copie.
Cependant, quelle ne fut ma surprise à l’Office National de l’Etat Civil et de l’Identification (ONECI) où je me suis rendu pour me faire établir la Carte Nationale d’Identité (CNI). Des agents m’opposent un refus catégorique pour avoir acquis une autre nationalité, invoquant l’article 48 du Code de la Nationalité.
J’ai envoyé mes enfants, nés ivoiriens, poursuivre leurs études au Canada où ils ont acquis la nationalité canadienne. En congé en Côte d’Ivoire, leur pays d’origine, j’ai entamé des démarches pour leur faire établir la carte nationale d’identité. Je réussis sans difficulté à leur obtenir le certificat de nationalité ivoirienne indispensable à la
délivrance de ce document. Malheureusement à l’ONECI, il m’a été rétorqué qu’ils ne sont plus en mesure d’obtenir ce document, arguant qu’ils ont perdu la nationalité ivoirienne.
Né ivoirien, je suis allé en France poursuivre mes études, et j’ai acquis la nationalité française. De retour en Côte d’Ivoire, j’ai voulu renouveler mon passeport ivoirien. Toutefois, au service passeport, il m’a été signifié qu’étant devenu français, je ne peux plus avoir le passeport ivoirien.
REPONSE DU GARDE DES SCEAUX,
MINISTRE DE LA JUSTICE ET DES DROITS DE L’HOMME
En vertu de l’article 98 du Code de la nationalité, « le certificat de nationalité indique, en se référant aux titres II et III du présent Code, la disposition légale en vertu de laquelle l’intéressé a la qualité d’Ivoirien, ainsi que les documents qui ont permis de l’établir. Il fait foi jusqu’à preuve du contraire. » En application de cette disposition, il apparaît que la preuve contraire au certificat de nationalité délivré par le juge ne peut se faire que par la voie de la procédure de « contestation de la nationalité » régie par le Code de la nationalité, qui dispose en son article 77 nouveau que « la juridiction civile de droit commun est seule compétente pour connaître des contestations sur la nationalité ». Or, en cette matière, c’est le procureur de la République qui a seule qualité pour intenter, contre tout individu,
une action dont l’objet principal et direct est d’établir si celui-ci a ou n’a pas la nationalité ivoirienne (article 83 du Code de la nationalité). Dès lors, toute administration publique ou privée qui, dans le cadre de ses attributions, constate qu’un individu disposant d’un certificat de nationalité, a néanmoins perdu sa nationalité ivoirienne ou n’a pas en réalité cette nationalité, et que c’est peut-être à tort que ledit certificat de nationalité lui a été délivré, il lui appartient d’en saisir le procureur de la République du lieu de naissance de l’intéressé ou, s’il n’est pas né en Côte d’lvoire, le procureur de la République près le Tribunal de première instance d’Abidjan. Il reviendra alors à
celui-ci d’exercer l’action en contestation de nationalité devant la juridiction civile compétente; l’administration concernée devant lui produire les preuves dont elle dispose établissant que l’individu n’a pas ou n’a plus la nationalité ivoirienne. Il convient toutefois de relever que le fait pour l’administration de disposer de preuves de la perte de la nationalité par le pétitionnaire ayant produit un certificat de nationalité ou de ce que celui-ci n’a pas la nationalité ivoirienne ne fait pas obstacle à la réception de la demande de document administratif de l’intéressé et à la poursuite du traitement de ladite demande dont elle est saisie; celle-ci n’étant pas juge de la validité du certificat de nationalité produit par les autorités judiciaires.
Toutefois, l’administration concernée peut, si elle a dénoncé les faits au procureur de la République compétent, dans l’intérêt d’une bonne administration, surseoir à se prononcer définitivement sur la demande jusqu’au prononcé de la décision définitive de la juridiction compétente saisie ou jusqu’à la décision de classement sans suite par le procureur de la République, au cas où celui-ci n’entend pas donner une suite judiciaire à l’affaire, s’il juge les preuves insuffisantes.
Il en résulte que l’Autorité administrative n’est autorisée à opposer un refus de délivrer un document administratif réservé aux seuls Ivoiriens, à une personne qui n’aurait pas ou aurait perdu sa nationalité ivoirienne, en vertu de l’article 48 du code de la nationalité, que sur le fondement d’une décision judiciaire devenue définitive établissant que celle-ci n’a pas ou n’a plus la nationalité ivoirienne. Les mesures sus-décrites s’appliquent également lorsque, dans les mêmes circonstances, une personne produit à l’administration, à l’ appui de sa demande, un certificat de nationalité délivré postérieurement à un décret pris en application des articles 49, 52, 53 ou 54 du Code de la nationalité établissant que cette personne a perdu la nationalité ivoirienne ou qu’elle en est déchue.